Document de travail
Version du 21/06/2010
Le GT2 a pour objectif d’intégrer à la réflexion prospective sur les apprentissages à l’horizon 2030 un ensemble de questions relatives aux modes d’élaboration, de diffusion et de transmission (ou de co-construction) des savoirs, en lien avec les évolutions de l’instrumentation, et aux modes d’organisation et aux contextes d’enseignement et d’apprentissage en essayant de mettre en perspective les points de vue des institutions, des prescripteurs et des « éducateurs ».
Dans les échelles à considérer, nous travaillerons sur les différents niveaux :
Celles du sujet/individu mais pris dans son interaction au sein des groupes
Celles des organisations
Celles des réseaux/communautés (de pratique, épistémique)
Celle d’un pays et d’une société dans son ensemble ;
Le présent texte constitue un premier balisage du champ couvert par le GT2 permettant de situer et de discuter les interactions avec les autres groupes de travail. Il sera rapidement amendé à partir des échanges du symposium PREA2K30.
Le travail de ce groupe peut s’articuler autour de quatre thématiques principales, qui ne sont pas totalement disjointes, mais qui correspondent à des points de vue complémentaires.
La thématique de la construction même des savoirs, avant le choix même de ce qui pourra être enjeu d’enseignement, a pour objet d’étudier la diversité des « sources » de production des connaissances et leur poids relatif, la façon dont elles sont contrôlées, sélectionnées et/ou intégrées aux différents niveaux d’échelles précédemment évoqués.
En particulier, les questions de rapport à la science, de diffusion et de médiation sont à considérer : la manière dont les différents groupes sociaux appréhendent les sciences et les technosciences, les modalités de débat qui s’instaurent, les enjeux de savoirs qu’elles impliquent, etc.
Nous regarderons de manière spécifique les questions de recherche d’information qui ont été considérablement modifiées avec le déploiement d’internet et qui subiront peut-être d’autres bouleversements avec le développement annoncé de l’internet des objets. La régulation des informations, aux différents niveaux d’échelles, leur qualification, l’histoire de leur construction feront l’objet d’investigations.
La seconde thématique de notre groupe de travail porte sur l’évolution et les transformations des curricula dans leur forme, comme dans leur contenu. Il s’agira ici d’examiner les savoirs à transmettre — leur conception, leur mise en œuvre et leur développement — ainsi que leurs modalités de transmission tant du point de vue des instruments utilisés que des modes d’intervention des éducateurs mobilisés (enseignants, médiateurs, etc.).
S’agissant du premier point, nous nous intéresserons en particulier à la définition des programmes scolaires, en termes de connaissances et de compétences à acquérir et à développer, compte tenu notamment des mouvements sociotechniques, économiques mais aussi idéologiques et politiques actuels et à venir. Par prolongement, nous tenterons d’appréhender les possibles évolutions et/ou mutations des disciplines scolaires dans l’enseignement général et technologique. La question du genre sera également traitée avec en particulier un examen de l’évolution des discours et des pratiques concernant la place des filles notamment dans les filières scientifiques.
S’agissant du second point, nous nous intéresserons d’une part à la conception des ressources pour l’éducation et la formation (manuels scolaires et parascolaires, sites webs, learning objects, programmes de télévision…) et d’autre part à la posture des enseignants confrontés à de nouvelles formes d’accès aux connaissances, de transmission de ces connaissances et de validation des acquis. La maîtrise des instruments étant partie prenante des apprentissages comme des enseignements, nous examinerons les questions des pratiques et cultures numériques chez les différents acteurs du paysage éducatif (digital literacy, digital fluency) et leurs possibles évolutions dans le futur.
Nous nous intéressons aux formes et rôles des institutions publiques et privées de l’éducation et de la formation, des organismes de recherches, des entreprises : modalités de régulation par les institutions ; formation des enseignants et des formateurs ou plus largement des éducateurs ; modalités d’association entre établissements d’enseignement et structures associatives et autres institutions extérieures à l’école.
Ainsi, sur l’exemple de la question de l’évaluation, on peut essayer d’analyser la manière avec laquelle les politiques d’évaluation ou encore d’accountability ont modifié le panorama éducatif : la conception d’instruments d’évaluation a un effet important sur les formes d’enseignement.
Une focalisation sera faite sur la question de l’alternance et de l’articulation école-entreprise dans les formations initiales de tous niveaux. En France, celles-ci ont vu ces 10 dernières années le développement de l’alternance s’appuyant sur des apprentissages de type scolaire et des apprentissages par l’expérience de travail sur des temps de plus en plus importants. La juxtaposition de temps scolaires et de temps de travail pose le problème de la mise en rapport d’apprentissages a priori d’ordres différents et de la cohérence des contenus de ces apprentissages à l’échelle d’un curriculum. Certains programmes sont actualisés avec des méthodes de transposition de situations de travail considérées comme représentatives de champs professionnels dans le milieu scolaire. Ces méthodes, qui font l’objet de discussions et de réformes au niveau européen (Fischer et Bauer, 2007 ; Prot et al. 2009), sont fondées sur des présupposés souvent implicites concernant les étapes de développement des compétences et sur les mobilisations de connaissances académiques en situation. Quels sont ces présupposés, comment caractériser leurs évolutions ? Comment l’évolution des connaissances sur les processus d’apprentissage des élèves et des apprentis peuvent-elles renseigner ces méthodes ? Quelles nouvelles articulations entre situations scolaires et situations de travail peuvent être imaginées ? Quelles nouvelles formes de collaboration et quels besoins de formation pour les enseignants, tuteurs et maîtres d’apprentissage ?
La quatrième thématique du GT2 concerne les contextes et modalités d’enseignement, et plus généralement de diffusion des connaissances et de mise en œuvre d’activités à finalité éducative. Tout processus d’éducation peut prendre trois formes différentes (UNESCO, 2006), qu’elle soit formelle (à savoir scolaire), non formelle (dite extrascolaire) ou encore parallèle (également dite accessoire, occasionnelle, diffuse, spontanée, informelle…), cette dernière concernant des activités d’instruction non structurées (Evans, 1981). Ces différentes formes d’éducation s’accompagnent de modalités alternatives de transmission des connaissances en s’inscrivant dans des cadres non institutionnels, de loisir (comme les musées de sciences par exemple), associatif ou encore familial (Home schooling).
Nous envisagerons l’évolution des relations entre ces différents systèmes, du point de vue de leurs complémentarités mais aussi de leurs singularités, compte tenu notamment des besoins et des contraintes des publics apprenant, qu’ils soient « tout venants » ou porteurs de spécificités (individus migrants, en situation d’exclusion, à besoins spéciaux, etc.). La pluralité des particularismes culturels et linguistiques qui teinte le paysage éducatif aujourd’hui sera également intégrée. Aussi nous examinerons l’évolution quantitative et qualitative des populations concernées, du côté des apprenants mais aussi des différents acteurs prescrivant, réalisant et administrant l’éducation et la formation. Enfin, une réflexion sur les modalités d’enseignement – actuelles et à venir — ne saurait être aboutie sans porter un regard sur les processus d’appropriation qu’elles sont susceptibles de faire émerger chez les apprenants. Qu’en est-il, par exemple, des mécanismes d’apprentissage par imitation dans des environnements d’apprentissage répartis temporellement et géographiquement ? Des formes de travail collaboratif/coopératif dans des situations d’apprentissage à distance ? Nous tenterons également de répondre à ce champ d’interrogations.
Evans, P.R. (1981), La planification de l’éducation non formelle, Principes de planification, n° 30, Paris, Institut international de planification de l’éducation/UNESCO. 117 p.
Fischer, M. et Bauer, W. (2007). Les différentes façons d’aborder l’orientation « processus de travail » dans la définition des programmes d’études allemands, Revue européenne de formation professionnelle, 40, 154-173.
Prot, B., Ouvrier-Bonnaz, R., Mezza J., Reille-Baudrin, E. et Vérillon, P. (2009). Développer le métier pour rénover le référentiel, CPC documents, 8.
UNESCO / UIS (2006), Classification internationale type de l’éducation 1997, Paris, UNESCO. 49 p.